Éditions GOPE, 468 pages, 13x19 cm, 24 €, ISBN 978‐2‐9535538‐2‐6

mercredi 7 décembre 2011

Seven Lonely Days

La chanson Seven Lonely Days est la chanson fétiche du couple Robert Lomax - Suzie Wong. Voici la version chantée par Georgia Gibbs, celle qui était probablement jouée à Hong Kong lorsque Richard Mason y a séjourné à la fin des années cinquante.





Mais à la même époque, à Shanghai, ou à Pékin et peut-être même  à Hong kong, une autre version, celle-là interprétée par Zhang Lou, était jouée dans les établissements dont la clientèle était chinoise.




Extrait :

C’était un endroit appelé Happy Room, de loin le plus élégant que j’eus visité, décoré comme une boîte de nuit de luxe, avec une piste de danse, des tables dans des niches et des lumières tamisées. Deux filles dansaient ensemble et deux ou trois autres attendaient à des tables vides. Il n’y avait pas de clients. Je m’assis et posai ma question à celle qui s’approcha.
« Oui, dit-elle, il y a une Suzie chez nous.
— Suzie Wong ? précisai-je, en me rappelant ma dernière escale et l’apparition de la Suzie boursouflée.
— Oui, Wong Mee Ling. Elle est en train de jouer au mah-jong avec les autres. C’est d’un calme, ce soir ! C’est épouvantable. Je vais la chercher. »
Elle disparut derrière une portière de velours. Quelques secondes plus tard, le pick-up entonna Seven Lonely Days, la chanson à succès du Nam Kok, que Suzie et moi avions fini par considérer comme notre indicatif et que je ne pouvais entendre sans être envahi de tendres et tristes souvenirs. Il me parut impossible que ce disque fût joué à cet instant précis par hasard et je fus certain que Suzie l'avait choisi. Je poussai un soupir de soulagement et de joie, car elle n’aurait certes pas eu ce geste sentimental si elle n’avait pas été heureuse de ma visite.

© Richard Mason, 1957
© Éditions GOPE, 2011, pour la version française

lundi 25 juillet 2011

Mason a su s’effacer et braquer le projecteur sur Suzie

Les éditions Gope rééditent dans une nouvelle traduction ce classique de la littérature anglophone, une histoire d'amour entre un étranger et une prostituée dans le Hong Kong de 1957. L'éditeur, David Magliocco répond à nos questions.

ALC : Pourquoi rééditer ce livre aujourd'hui, et que peut apporter sa lecture en 2011 ?
David Magliocco : Toute personne qui s’intéresse à Hong Kong, à la prostitution, aux relations entre Orient et l’Occident (et notamment aux romances mettant en jeu un Occidental et une Orientale au sens large), a entendu parler de Suzie Wong. Quelquefois, sans trop savoir s’il s’agit d’un livre, d’un film, d’un fait-divers…

Or, il s’agit avant tout d’un livre, un très beau livre, écrit par un anglais, Richard Mason, en 1957. La version originale anglaise n’ayant pas pris une ride - ce qui n’est pas le cas de la version française éditée dans les années soixante et qui n’est d’ailleurs plus disponible depuis plusieurs décennies - nous avons donc décidé de réviser, corriger, augmenter la traduction et de republier Le monde de Suzie Wong.
Le but était de lui garder un petit côté rétro et de gommer tous les aspects démodés. En effet, il s’agit d’un premier ouvrage d’une série consacrée à Hong Kong, et le suivant, À la poursuite de Suzie Wong de James Clapp, à paraître fin 2011, reprendra une partie des personnages dans le Hong Kong de 1997, juste avant la rétrocession.

Ce livre est à la fois moderne et à la fois une image d’un passé révolu.

En effet, l’histoire d’amour de Robert Lomax et de Suzie Wong, une histoire d’un amour impossible, est intemporelle et se répète aujourd’hui même en Thaïlande, aux Philippines, etc. Remplacez seulement Suzie par Noi et Hong Kong par Bangkok et le tour est joué.

Et pourtant, depuis les années cinquante, notre relation avec l’Asie a énormément changé. Le monde de Suzie Wong est le monde d’hier, celui d’un Hong Kong qui a disparu, avalé par une frénésie de progrès que rien n’avait semblé arrêter jusqu’à présent. La fascination a changé de camp et la lecture des deux livres permettra de juger de cette évolution et de faire la comparaison avec la situation présente.

ALC : Comment expliquez-vous le succès qu'à eu le livre à l'époque de sa première publication ?
Ce livre a surtout eu un retentissement dans le monde anglo-saxon. À cause du côté sulfureux, l’histoire se déroule dans un hôtel de passe. Une récente affaire de mœurs mettant en cause un homme politique français a montré que notre conception de la sexualité ou de la prostitution n’est pas du tout la même en France.
D’ailleurs, quand Le monde de Suzie Wong est sorti, les maisons closes étaient officiellement interdites depuis peu en France et la capitale avait un grand nombre de bordels clandestins. De plus, la France était surtout polarisée sur ses colonies – dont l’Indochine - et Hong Kong, colonie anglaise, ne faisait pas vraiment partie des sujets favoris.
Je crois donc que ce livre est passé relativement inaperçu en France bien qu’il ait été publié après la sortie du film avec William Holden et Nancy Kwan.
Ce livre a eu aussi du succès, je crois, grâce au talent de Richard Mason qui a su rendre le personnage de Suzie Wong vraiment attachant et inoubliable. Il n’y a pas de hasard, et, année après année, décennie après décennie, génération après génération, le constat est le même, le lecteur (ou la lectrice) en pince malgré lui (elle) pour Suzie Wong. 
Bien que narré à la première personne, ce livre est à des kilomètres de ces autobiographies et autres autofictions si populaires en France et où on frôle l’overdose de « je » ; Mason a su s’effacer et braquer le projecteur sur Suzie. D’ailleurs, une fois le livre refermé, on ne sait pas vraiment quel âge a Robert Lomax et à quoi il ressemble.
Contrairement à Woman of Bangkok de Jack Reynolds, sorti peu avant et qui a le même thème, le livre de Mason a aussi une condition sine qua non pour plaire à un public anglophone, un happy end .
Le film a bien sûr permis de faire connaître Hong Kong dans le monde entier, et a contribué à la longévité du livre.

ALC : Les lecteurs occidentaux expatriés en Chine pourront-ils se reconnaître dans le personnage de Robert ?
« Les livres ne nous apprennent rien, au mieux ils nous confirment ce que nous savons déjà » a dit ou cité Henry Miller. La même histoire peut se répéter à peu de chose près à Pékin, où un expatrié pourrait rencontrer une fille d’Oulan-Bator dans un bar de Pékin, comme le Club Suzie Wong à Chaoyang Park. La boucle serait bouclée.

Benjamin Gauducheau (Aujourd'hui la Chine)
http://chine.aujourdhuilemonde.com

mercredi 20 juillet 2011

Kowloon, Chine, 1957

Kowloon, Chine, 1957. Une jeune chinoise attend sur le quai. Dans quelques minutes, Suzie traversera le bras de mer qui la sépare de l'île de Hong Kong. Deux pas en arrière, Robert l'observe... Le Monde de Suzie Wong c'est une romance à la confluence de l'Europe et de l'Asie. L'histoire d'amour improbable entre une prostituée chinoise et un peintre anglais. Hong Kong y est la toile de fond, le lieu du possible. Ne vous fiez pas à la vilaine couverture façon « chick-lit », on en est loin !
Le roman est paru au Royaume-Uni en 1957 sous la plume d'un homme. Mais sans jamais sombrer dans le mièvre, l'amour est bel et bien la trame de l'histoire. Hong Kong y est idéalisé et abordé avec légèreté même si c'est le Nam Kok, un hôtel de passe du quartier chaud de Wanchai qui accueille l'essentiel de l'intrigue. Tout le talent de Richard Mason, tout le plaisir de lire ce roman, tient de la naissance, au fil des pages, d'un personnage plus qu'attachant, incarnation de l'incernable Extrême Orient : Mee Ling, alias Suzie Wong.

Par Constance Balland, Easyvoyage.com
www.easyvoyage.com/livre/le-monde-de-suzie-wong

mardi 28 juin 2011

le Nam Kok : le point de contact, le point de départ

[…]
« Monsieur est trop bon, dit-il. Monsieur a une fille ici ? ajouta-t-il en rentrant dans la chambre.
— Une fille ? Non. »
Je supposai qu’en disant « ici », il voulait dire à Hong Kong, et je ne compris toujours pas. Je redescendis par l’ascenseur bringuebalant et donnai des arrhes à la réception pour être sûr qu’on me garde la chambre. Le reçu fut rédigé en chinois. Je pouvais entendre des bouffées de musique de danse qui provenaient d’une porte battante au fond du hall. Je fis un geste vers cette porte et demandai :
« Qu’y a-t-il par là ?
— Le bar.
— Épatant. Je vais boire une bière. »
Je traversai le hall et au même instant les battants s’ouvrirent et livrèrent passage à un matelot de la Royal Navy, un petit homme nerveux et hâlé. Son béret portait en lettres d’or le nom de son bateau, le H.M.S Pallas. Il me fit un signe de tête distrait. Je ris et m’écriai :
« Grands Dieux ! La Navy ! C’est bien le dernier endroit où je me serais attendu à la trouver !
Il me jeta un regard bizarre, comme l’avait fait l’employé de la réception.
— Ma foi, collègue, tu ne trouveras pas grand-chose d’autre, dit-il. Pas au Nam Kok.
— Ah non ? Vous voulez dire qu’il n’y a pas de Chinois ici ?
— Les filles seulement. Les filles sont chinoises.
La porte se rouvrit et une jeune Chinoise apparut, se précipita vers le matelot en riant.
— Hé, tu m’as laissé tomber !
Elle portait des chaussures à talons hauts et une cheongsam à col montant, fendue sur la hanche. Elle était très jolie. Le marin reprit :
— Et ce sont de bonnes gosses, si on les traite bien. Pas vrai Nelly ? Hein ?
— Bien sûr, nous sommes toutes gentilles, approuva gaiement la fille en tirant le matelot par la manche. Allez, viens, tu parles trop. Tu me mets à cran.
— Moi, je te dis, gabier, tu trouveras pas mieux, insista le marin en se laissant entraîner, quelque peu titubant. »
Je les regardai traverser le hall en riant tout seul. Quel idiot je faisais ! J’aurais dû comprendre, rien qu’à voir la tête de l’employé quand j’avais demandé une chambre. Une chambre au mois ! Il devait plutôt avoir l’habitude de les louer à l’heure.
Je poussai les battants de la porte et pénétrai dans le bar.
La pièce me parut sombre après le hall inondé de soleil. Des rideaux masquaient les fenêtres et la salle était éclairée, comme une boîte de nuit, d’une lumière rose diffuse. Quand mes yeux furent habitués à la pénombre, je vis le comptoir dans un coin, le grand juke-box en noyer couvert de chromes qui jouait Seven Lonely Days, les garçons de salle chinois avec leurs plateaux chargés de bières, les marins… et les filles.
Oui, le marin avait raison. Je ne trouverais pas mieux que le Nam Kok.
[…]
© Richard Mason, 1957
© Éditions GOPE, 2011, pour la version française

jeudi 16 juin 2011

Suzie Wong fait encore parler d'elle

Le monde de Suzie Wong a déjà fait couler beaucoup d'encre et ce n'est pas fini ! Aussi bien le roman que le film ont donné lieu à diverses interprétations et ont servi de base à différentes études.
Voici un extrait d'un article paru récemment dans Genre, sexualité & société, une revue francophone à comité de lecture, consacrée à la sexualité et aux questions de genre.

Les constructions raciales et genrées dans Le monde de Suzie Wong

[...]
Dans la narration, l’interdit moral du métissage se confond avec l’interdit sexuel. Le conservatisme des expatriés est présenté comme un défaut pur et simple de désir sexuel, un complexe, une frustration, en somme un déséquilibre de la personnalité. À l’inverse, la transgression que constitue le désir de Robert pour les femmes indigènes figure autant l’expression libre d’une sexualité équilibrée qu’un juste progressisme social qui s’oppose à l’ordre colonial obsolète. Inhibé par le tabou de la relation interethnique, Robert transgresse d’abord symboliquement l’interdit moral à travers la peinture, qui est l’expression de sa puissance sexuelle. L’acte de peindre des femmes indigènes figure la définition et le contrôle de leur sexualité, par opposition avec celle des femmes expatriées (Stella dans les extraits suivants) qui demeure incontrôlable :
« La puissance créatrice est d’origine sexuelle et ce n’était certes pas par hasard que je préférais peindre les Malaises, tout comme d’autres artistes se plaisent à faire des nus. (Un peintre qui prétend que le corps féminin ne l’intéresse que d’une façon abstraite raconte des histoires. Autant peindre des coussins). Les filles indigènes éveillaient en moi des sentiments que, faute de pouvoir exprimer ouvertement, je traduisais comme je pouvais sur la toile et qui donnaient à mes œuvres le peu de mérite qu’on pouvait leur reconnaître. Stella n’avait jamais rien éveillé de tel. » (Mason, 1958, 24).
« Elle se précipita sur son peigne, sa poudre, son rouge et pendant qu’elle se pomponnait, je me sentais bouillir de rage. J’avais envie de lui crier :
– Petite sotte ! Espèce d’imbécile vaniteuse ! Petite garce idiote ! Tu ne comprends donc pas pourquoi je peins les Malaises ? Tu ne vois pas la différence ? Tu ne vois pas qu’elles possèdent une candeur que tu as perdue ? » (Mason, 1958, 23).
La sophistication des femmes occidentales représente une sexualité, quand bien même serait-elle orientée en faveur de la reproduction de la construction normative du genre, qui se soustrait à toute réappropriation. À l’opposé, les femmes indigènes seraient authentiques. La candeur constitue une distance qui permet de nier leur propre sexualité pour la définir en conformité avec un idéal hétéronormatif (Marchetti, 1993, 119-124). Cet idéal normatif s’exprime dans l’ensemble du discours sur le sexe que constitue la trame de la narration, notamment à travers une conception moralisante et essentialiste de la prostitution :
« J’avais une grande affection pour ce lieu et plus encore pour les filles, car s’il était exact que leur profession, l’offrande perpétuelle de leur corps à des matelots de passage, était essentiellement dégradante, je n’avais jamais cessé d’admirer avec quelle obstination elles parvenaient à surmonter leur déchéance ; elles n’avaient abandonné ni leurs manières délicates, ni leur sensibilité, ni leur fierté et c’était pour moi une source d’étonnement perpétuel que de voir fleurir, sur un sol aussi stérile que la prostitution, de telles fleurs de générosité, de tendresse, de gentillesse et d’amour. Et ce n’était pas seulement chez Suzie que j’avais constaté cette innocence du cœur. » (Mason, 1958, 203).
La sexualité idéalisée projetée sur les indigènes est à la fois hyper-exaltée, disponible et contrôlable :
« Devant moi, il y avait un matelot et une petite Chinoise à qui l’Occident avait visiblement fait perdre tous ses complexes asiatiques. Ils s’embrassaient à bouche que veux-tu. » (Mason, 1958, 214).
La construction de cette sexualité idéalisée s’opère aussi par contraposée, en désignant les pratiques qui s’opposent à l’idéal normatif construit à travers les personnages du livre :
« Betty Lau était une de ces filles, plus communes d’ailleurs en Occident qu’en Chine, qui savent compenser leur frigidité par un débordement de sexualité apparente. Il émane d’elles une sorte d’excitation perpétuelle, elles donnent l’impression qu’elles ne sauraient résister à la tentation et elles mènent les hommes par le bout du nez, faisant miroiter leurs appas… jusqu’à la porte de la chambre, et puis elles poussent des cris scandalisés et se prétendent offensées. Des allumeuses. » (Mason, 1958, 216).
Le « sexe » est construit dans le roman comme un point imaginaire par lequel « chacun doit passer pour avoir accès à sa propre intelligibilité […], à la totalité de son corps […], à son identité […] », il fonctionne comme « signifiant unique et comme signifié universel » (Foucault, 1976, 204-205) :
« J’éteignis et je pus voir la silhouette de Suzie se détacher sur un fond de ciel, l’immense ciel de Chine. Elle glissa hors de son cheongsam [en italique dans le texte, robes chinoises popularisées en Occident notamment par le film Le monde de Suzie Wong]. Sa chevelure tomba en avant quand elle se pencha pour ôter ses bas. Elle vint me rejoindre dans le lit. Son corps était frais, inconnu et personne ne l’avait jamais touché, parce qu’un miracle l’avait purifié. Et je me dis que cet instant était le premier du monde, le commencement de tout, celui où deux imparfaites moitiés allaient former un tout admirable. » (Mason, 1958, 184).
Le roman de Mason figure dans sa narration ce que Judith Butler a montré dans Trouble dans le genre : l’identité genrée se construit à travers la répétition stylisée d’actes (Butler, 2006, 265), représentée dans la narration par l’acte de peindre qui est la projection d’un idéal normatif de genre. La différence ethnique, par la distance qu’elle implique selon les expatriés, rend possible cette projection. Cette prise de pouvoir symbolique réalise la construction fantasmée du sujet masculin à travers le « sexe » et la transgression sociale du métissage. [...]

L'article entier peut être lu ici : http://gss.revues.org/index1878.html#quotation

Nicolas Paris , « « Comme à l’époque de Suzie Wong ». Les mutations du red-light district de Wan Chai », Genre, sexualité & société [En ligne] , n° 5 | Printemps 2011 , mis en ligne le 01 juin 2011
© Tous droits réservés

© Richard Mason, 1957
© Éditions GOPE, 2011, pour la version française

mercredi 25 mai 2011

Le monde de Suzie Wong est le monde d’hier

Le monde de Suzie Wong est le monde d’hier, celui d’un Hong Kong qui a disparu, quoique pas tout à fait…

Extrait

Si par hasard nous avions faim, elle téléphonait au restaurant du coin et nous faisait apporter un encas. Un quart d’heure après, quelle que soit l’heure, même à deux heures du matin, un coolie frappait à ma porte, une longue canne de bambou sur l’épaule d’où étaient suspendus de part et d’autre deux plateaux, comme ceux d’une antique balance, chargés d’une douzaine de petits plats couverts, avec du poulet, du porc, du poisson et les mille gourmandises chinoises dont je n’ai jamais pu pénétrer les mystères. Le coolie dressait la table sur mon balcon. Cette livraison des repas à domicile, de jour comme de nuit, est courante en Chine, et l’addition est extraordinairement raisonnable si l’on songe au luxe réel de ces repas. Suzie voulait toujours payer, car mon budget l’inquiétait fort, et elle y parvenait quelquefois. Mais si je la devançais, elle me demandait toujours quel pourboire j'avais donné au coolie. J’étais bien obligé d’avouer que je donnais cinquante cents, bien peu de chose au fond.
© Richard Mason, 1957
© Éditions GOPE, 2011, pour la version française

jeudi 28 avril 2011

Est-ce que le nom de Suzie Wong vous dit quelque chose ?

Aujourd’hui, est-ce que le nom de Suzie Wong vous dit quelque chose ? Une ligne de vêtements sexy, une marque de produits asiatiques, le nom d’un restaurant... Mais saviez-vous que cela vient d’un roman écrit par le britannique, Richard Mason ? « Le monde de Suzie Wong », qui vit le jour en 1957, décrit la rencontre et la romance entre Suzie, une prostituée de Hong Kong, et Robert Lomax un peintre américain. Entre un homme qui vient de perdre son temps dans une plantation d’hévéas en Malaisie, et cette jeune femme pauvre, mère célibataire, rejetée de tout côté. Le livre a eu un tel succès qu’il fut adapté au cinéma en 1960, avec les acteurs William Holden et Nancy Kwan. Comment expliquer un tel engouement ? Probablement, la fascination pour l’inconnu, l’exotisme. Comme l’explique Gérard Henry, journaliste et directeur adjoint de l’Alliance française à HK en préface de l’ouvrage : « Séduire Suzie Wong, c’était pour l’étranger trouver la clé qui ouvrirait la porte d’une culture qui lui était incompréhensible. Suzie Wong devenait ainsi l’incarnation de l’exotisme et l’objet de tous les fantasmes occidentaux, fantasme érotique y compris, car ce dernier imaginait des plaisirs rares et inconnus, dignes des paradis artificiels ». Et aujourd’hui encore, l’histoire de cette rencontre improbable vaut toujours la lecture, un demi-siècle plus tard. Bien écrit, divertissant, riche en rebondissements, le roman a plutôt bien vieilli. Un petit détour par Hong Kong ?

lundi 25 avril 2011 par Emmanuel Deslouis, eurasie.net 
www.eurasie.net/webzine/spip.php?article1030

mardi 22 mars 2011

Le monde de Suzie Wong, chapitre 1 (extrait)

[…]
Le bateau frémit de la poupe à la proue quand le mécanicien renversa la vapeur, puis il se serra contre la jetée de Wanchai. La passerelle s’abattit bruyamment et je suivis Mee Ling, dans la foule compacte. Nous nous arrêtâmes sur le quai, près d’un groupe de pousse-pousse, nonchalamment accroupis entre les brancards de leurs véhicules. À une centaine de mètres à peine, le long du quai, s’élevait le Nam Kok. Je pouvais voir son enseigne de néon bleu et mon balcon du dernier étage, avec mon chevalet et le carré blanc de la toile, le portrait de Gwenny que j’avais commencé le matin. Mee Ling suivit la direction de mon regard.
« Qu’est-ce que c’est que cette maison ?
— Laquelle ? balbutiai-je d’un ton vague, puis je repris avec assurance : Et de quel côté allez-vous maintenant ?
— Hennessy Road.
— Prendre le tramway ?
— Non. Il y a une voiture qui m’attend là-bas.
— Puis-je vous accompagner jusqu’à votre voiture ?
— Non. Le chauffeur le dirait à mon père.
— Et j’imagine que Monsieur votre papa vous fesserait ?
— Oui. Peut-être.
— Et vous ne voulez pas faire une folie et accepter mon invitation à dîner ?
— Non. Maintenant, je m’en vais. »
Elle me tendit une main protocolaire, pouffa brusquement comme si cette rencontre avait été scandaleuse, et fit demi-tour. Elle partit en courant vers Hennessy Road, son panache de cheveux flottant derrière elle, se retourna une fois pour agiter la main, puis elle se perdit dans la foule des piétons, des pousse-pousse et des marchands des quatre-saisons.
Et voilà. Elle était partie… Je poussai un soupir et me dirigeai vers le Nam Kok.
[…]

© Richard Mason, 1957
© Éditions GOPE, 2011, pour laversion française

mercredi 9 mars 2011

Suzie Wong est de retour

© Studio Bull & Éditions GOPE
Les éditions GOPE vous annoncent la sortie très prochaine de leur troisième livre :  Le monde de Suzie Wong de Richard Mason.

Après plusieurs décennies d’absence, découvrez ou redécouvrez un classique de la littérature anglophone réédité avec une traduction révisée et complétée !

Cette version est également augmentée d’une introduction par Gérard Henry, l’auteur de Chroniques hongkongaises, d’un essai d’Étienne Rosse, l’auteur de Trois autres Thaïlande, ainsi que d’une biographie de Richard Mason établie avec la collaboration de sa veuve.


Hong Kong 1957 : le pousse-pousse est le moyen de transport le plus répandu, les sampans sillonnent la baie…

Robert Lomax, un peintre alors sans succès, vient y chercher sa Muse et la trouve dans le bar d’un hôtel en la personne de Suzie Wong, une pétillante jeune prostituée mère d’un enfant en bas âge.

Suzie tombe amoureuse de Robert, mais elle est prisonnière de sa profession. Son histoire est celle du chemin de la pauvreté vers la richesse, de la fascination exercée par l’Orient sur l’Occident ainsi que celle d’une identité hongkongaise en devenir.
La force d’un amour vrai peut-elle venir à bout des différences de race, de culture et de statut social ?


Richard Mason (1919-1997) est un écrivain britannique peu connu en France, mais il a été célèbre dans les pays anglophones. Plusieurs de ses livres ont été adaptés au cinéma dont ce roman, avec William Holden et Nancy Kwan dans les rôles principaux.
Avec Suzie Wong, il a su créer un personnage attachant et inoubliable.


Le monde de Suzie Wong
Richard Mason – Éditions GOPE
468 pages, 13x19 cm , I.S.B.N. 978‐2‐9535538‐2‐6